Depuis l’explosion de Mister V, ils sont nombreux à venir de YouTube et à vouloir se lancer dans le business du rap. Seb, Maskey et autres Prime s’imposent maintenant comme les porte-étendards d’une génération qui touche à tout.
Lorsque Prime remplit le Bataclan en 2017, puis l’Olympia en 2019, la scène rap française a quelque peu tremblé. Pas de maison de disque, pas de label, ni même d’album pour propulser le jeune « raptuber » de la Courneuve sous les projecteurs. Un parcours qui force le respect pour celui qui a commencé en faisant des vidéos sur le jeu FIFA. Après s’être lancé dans les vlogs avec sa série Lavide, il s’essaye au rap en kickant ses premières lignes sur ses freestyles « Huh.mp3 » et « Félaback.mp3 ».
Il continuera son bonhomme de chemin en publiant un premier projet sur Soundcloud, Caca Boud1. Un nom qui représente bien l’aspect léger, d’un rap qui prône l’épicurisme et qui ne se prend pas au sérieux. Ce qui deviendra sérieux par contre, c’est la force apportée par sa communauté. Avec 1,59 millions d’abonnés à l’heure actuelle, il se sert de ces derniers comme tremplin majeur. Une base fidèle qui le suivra partout, et jusque dans ses concerts à l’Olympia et au festival des Ardentes notamment.
Mais si les youtubers peuvent déjà s’affranchir de la contrainte de se trouver un public, on s’aperçoit que la plupart ont un réel talent pour la discipline dans laquelle ils s’engagent. Seb, anciennement Seb la Frite sur YouTube, a débuté en jouant les producteurs amateurs. En 2016, Jul devient officiellement L’ovni alors que PNL rentre tout juste Dans la légende. Seb, lui, met en ligne un webdocumentaire sur l’histoire du rap. Une vidéo qui marquera le début de son ascension dans un domaine qui lui sied à merveille.
Coup sur coup, il présente Rilès, Berywam, et surtout le rappeur nancéien Kikesa, déjà bien implanté sur YouTube lui aussi avec ses freestyles tous les dimanches. « Il y a eu un avant et un après. Le lendemain mon téléphone était cassé ! » expliquait-t-il dans un entretien à 20 Minutes. Un coup de pouce qui aura donc réussi à lancer plusieurs carrières en même temps, dont celle de l’autoproclamé dénicheur de talents du rap français.
Et à l’heure où il existe autant de manières de rapper que de collabs avec Supreme, chacun est susceptible d’y trouver sa place. Seb s’est d’ailleurs aussi essayé à la chanson, en postant d’abord un premier freestyle pour célébrer ses 3 millions d’abonnés. Une première tentative timide dans le texte, mais à la prod complètement réussie, ce qui pouvait laisser espérer de belles surprises pour la suite. Ce qui lui a permis de signer chez Wagram en 2019 … en tant que rappeur justement.
Et après un nouveau freestyle ultra technique, « Waw » et deux clips plus conscients, plus proches de l’egotrip, « Taedium » et « Antistress », Seb a définitivement convaincu les plus sceptiques en élargissant sa palette. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir aussi publié un documentaire sur YouTube (et à la télé !) narrant son voyage en Papouasie au cœur de la jungle locale. Une manière d’ancrer un peu plus cette volonté des youtubers de se diversifier autant dans les formats que dans les disciplines.
« Les rappeurs sont influenceurs maintenant, et Booba c’est un média rap ! »
Seb, 20 Minutes, 11 décembre 2019
Instagram et YouTube s’imposaient auparavant comme des tremplins à l’activité des artistes. Ils sont devenus des ustensiles indispensables à la gestion de la communauté et à la promotion de ses propres activités. Une évolution inexorable qui fait de plus en plus se rapprocher les rappeurs de ce que font les influenceurs. Dissimulé derrière son masque en tissu, Maskey s’inscrit lui aussi dans cette tradition née sur YouTube. Arrivé en France en 2012 à Orléans pour ses études, le vidéaste masqué a lui explosé dans un tout autre domaine : le beatmaking.
De retour aux affaires en 2020 avec son concept de « La Recette », il tend toujours à parodier des artistes en décryptant puis imitant leurs codes vestimentaires, leurs lyrics, leurs univers,… Il y a 4 ans, il décortique la musique du duo iconique des Tarterêts, PNL, pour ce qui restera l’une de ses vidéos les plus vues (6,7 millions de visionnages).
Au-delà de ses vidéos parodiques ultra-travaillées où il réalise lui-même ses prods et fait souvent appel à des clippeurs, Maskey a lancé sa propre BD l’année dernière. Une bande dessinée qui narre l’histoire d’un personnage qui rêve de devenir influenceur. Un moyen d’interroger nos rapports aux réseaux sociaux et à la notoriété sur le web. Outre ce projet, il a annoncé sur Instagram avoir signé chez AWA en tant que beatmaker, le label de DJ Kore qui gère, entre autres, les cas Zola, Diddi Trix et Luv Resval. Une juste récompense pour celui qui refuse toujours par contre de s’essayer au rap en tant que tel, arguant ne pas être suffisamment profond dans ses textes.
Ce qui reste certain, c’est que les « raptubers » ont de beaux jours devant eux, dans cette gigantesque galaxie qui gravite autour du rap. Et que cet espace a tout à offrir à cette lignée de jeunes astronautes qui brisent les codes et ne se limitent plus qu’à la chanson. 🌎
Et puisque le monde de YouTube est vaste, je vous propose de relire l’article sur Shirin David publié la semaine dernière sur le site. Il s’agit d’une youtubeuse allemande qui a annoncé son retour en grande pompe dans le rap game il y a quelques semaines !
Pour aller plus loin :
https://yard.media/maskey-interview/
Dans cet article, j’ai choisi de ne pas traiter en priorité les « rappeurs issus de YouTube » comme Kikesa ou Rilès, qui eux, ont toujours fait du rap et plutôt utilisé Youtube comme plateforme de lancement, pour rester dans le thème de l’espace. J’espère que l’article vous plaira quand même, enjoy ! 🚀