Un jour après ma naissance, le 25 mars 1997, The Notorious BIG sortait Life After Death, 16 jours après son assassinat. Retour sur un classique entaché d’un destin tragique.
Live Until Killed…« Till Death Do Us Part
Un an après All Eyez On Me de Tupac, Biggie Smalls revient lui aussi avec un double album. Dans un contexte ultra compliqué, avec les assassinat consécutif des deux géants du hip hop, les deux artistes nous laissent deux classiques, deux pierres angulaires du Rap et de la culture Hip-Hop en général. Le titre de l’album et tout le contexte gravitant autour donnent une dimension mystique à l’oeuvre, comme si une certaine prémonition lui avait été faite et que l’artiste se préparait à rejoindre son rival et ami…
Le projet comporte 24 titres séparés en 2 albums de 12 titres. Les productions sont littéralement légendaires, et ont été reprise des centaines et des centaines de fois depuis.
Majoritairement produit par P. Diddy, D‑Dot ou Stevie J., on notera aussi des prods de DJ Premier ou RZA. Cela donne un univers différent à chaque chanson et une palette multicolore à un album qu’on verrait plus noir qu’autre chose de part son titre et son contexte. On notera quelques invités qui eux aussi sont passé à la postérité : Puff Daddy, R Kelly, Jay‑Z, et Lil » Kim.
Un album qui respire les 90’s, la poudre et le complot. Plongeons-nous dans cette oeuvre…
Ready to Die
Levez un peu les yeux et vous pourrez voir la tracklist de l’album. Pas besoin de chercher pour trouver les classiques et les chansons générationnelles de Biggie. « Hypnotize », « Going Back to Cali » ou « Ten Crack Commandments » pour les plus connues, mais aussi « What’s Beef? », « I Love the Dough » ou « I Got a Story To Tell » pour les initiés. Ajoutons « Nasty », « You’re Nobody Til Somebody Kills You » ou « Sky’s The Limit » pour les pépites, et l’album est une masterpiece.
La première chose que l’on peut dire après l’écoute et la lecture de la tracklist, c’est que la mort est omniprésente dans cet album, dans sa musique et dans son contexte. On retrouve la mort dans les titres du début et de la fin de l’album, notamment « Somebody’s Gotta Die » et « You’re Nobody Til Somebody Kills You », respectivement 2ème et 24ème chanson du double album.
Je n’ai pas le temps pour compter toutes les références faites à la fatalité, mais elles sont inhérentes à l’écriture du Notorious BIG, qui en était obsédé. En termes d’écriture, on retrouve les thèmes des gangs, du luxe, des femmes mais aussi de la revanche, de l’ascension sociale et de la cause des afros dans une Amérique profondément raciste qui commence à peine à s’éveiller. On retrouve un véritable plaidoyer pour la cause noire avec « I Got A Story To Tell » qui est un son de rap conscient, comme on l’aurait appelé par chez nous.
La force de Biggie réside dans son phrasé et ses phases directes, puissantes. BIG est la véritable raison de l’existence du mot punchline. Son écriture est précise, courte et efficace. Le vocabulaire est recherché, même si les phrases sont simples au premier abord, et toute la force de Biggie vient du fait qu’il arrive à faire passer une construction très complexe dans une ou deux mesure et que ça semble naturel. Les placements, le flow qui change constamment, les rimes variées sont délivrés avec une aisance incroyable, il rend le rap facile…
Comment parler de Biggie sans parler de storytelling ? Il écrit tellement bien que tous ses couplets semblent en être. La facilité qu’il avait à kicker venait selon lui du fait qu’il rappait comme il parlait, et cela expliquerait son Bac +12 en storytelling. Même 23 ans plus tard et des milliers de rappeurs ayant pop, très peu sont ceux qui ont ne serait-ce que approché Biggie dans ce domaine. A part avec peut-être Jay‑Z, Eminem et son rival Tupac, aucun débat n’est possilbe.
Mr Punchline
« Ron bought a truck, two bricks laid in the cut
His peeps got bucked, got locked the fuck up
That’s when Ron vanished, came back speaking Spanish
Lavish habits, two rings, twenty carats
Here’s a criminal, nigga made America’s Most
Killed his baby mother brother, slit his throat
The nigga got bagged with the toast »« Niggas Bleed »
Cette punch en dit long sur les fréquentations de Biggie, tout en mettant en valeur ses capacités à découper. Extrêmement bien écrite, on voit tout de suite que la structure paraît simple, mais qu’elle est en réalité complexe, et met en valeur les phases.
« I put hoes in NY onto DKNY (Uh-huh)
Miami, D.C. prefer Versace (That’s right)
All Philly hoes go with Moschino (Come on)
Every cutie with a booty bought a Coogi »« Hypnotize »
Connu pour ses punchlines, BIG l’est moins pour ses jeux de mots, alors qu’il est monstrueux dans le domaine. Dans un son plus léger et plus dansant, Biggie s’amuse et arrive à travers son storytelling a caler des villes et des marques de luxe comme un trendsetter. Boss.
I’ve been in this game for years, it made me a animal
There’s rules to this shit, I wrote me a manual
A step-by-step booklet for you to get
Your game on track, not your wig pushed back« Ten Crack Commandments »
Les premières phases de ce morceau légendaire résonne dans mes os comme un avertissement sinistre. L’unique manuel universel pour vendre de la drogue. Le crack pour Biggie était le seul moyen de s’en sortir, et son expérience lui a permis d’écrire un morceau qui encore aujourd’hui est criant d’actualité. Légendaire.
« Don’t they know my nigga Gutter fuckin » kidnap kids
Fuck ’em in the ass, throw ’em over the bridge
That’s how it is, my shit is laid out
Fuck that « beef » shit, that shit is played out »« What’s beef? »
La dernière punch que j’ai choisi résume l’environnement dans lequel l’artiste vivait. Autour de tueurs, vendeurs de drogues et macs… Biggie ne parle pas aux flics mais laisse parler le fer. Ce même fer qui est venu à bout de lui 16 jours avant la sortie de cet album. RIP.
Outro
Comment résumer cet album autrement qu’en disant qu’il fait partie des 5 plus grands albums de tout les temps ? Tout dans cet album peut prétendre au label de Légendaire. Le contexte, l’obsession pour la mort, les instrumentales surpuissantes rendent cet album mystique, puissant et bizarrement, très actuel. Les meilleurs partent les premiers, et Biggie Smalls était l’un deux.
F0X