« J’fais des prods et j’danse en peignoir dans ma chambre. Est-ce que c’est vachement navrant ? Ou est-ce que j’ai trois ans d’avance ? » (« Forchetta », Figurine, 2016)
On serait tenté de répondre à Spider ZED qu’il avait bel et bien de l’avance. Bien qu’encore (trop) peu connu du grand public, le rappeur de 22 ans a su tirer profit de son flow nonchalant et décalé. En mai 2019, notre « Spider-Man sans pouvoir » sort son nouvel EP intitulé Bien ou quoi, son troisième projet après Figurine (2016) et Pas si sûr (2018). Et pour cause : ce n’est pas un novice.
Spider ZED surgit de l’ombre pour la première fois en 2012 entouré de son groupe, le High Five Crew. Les cinq membres (Assassam, LecHad, Eden Dilinger, Calvin Davey et Spider ZED) décident quatre ans plus tard de mettre ce projet commun sur pause. C’est le moment pour notre super-héros désabusé de lancer sa toile en sortant son premier EP. C’est finalement grâce à son freestyle posté sur « Le Règlement », célèbre chaîne YouTube dédiée au rap (presque 700 000 abonnés), que le jeune autodidacte élargit son public.
« Un partage de YouTubeur et j’suis le nouveau phénomène. En attendant tout c’qu’on peut faire, on le fait nous-mêmes » (« Bien ou quoi », Bien ou quoi, 2019)

Il faut en effet reconnaître à Spider ZED son indépendance. Comme de plus en plus d’artistes aujourd’hui, il crée ses prods, ses lyrics, et sort régulièrement des clips en plus de s’enregistrer et de se mixer lui-même. Et dans le langage plein d’autodérision Spider ZEDien ça se traduit comme ça : « Je suis un peu le Rilès inconnu, sauf que je suis pas surveillant. J’habite pas à Rouen. Et je rap en Français » (extrait de son seul et unique podcast sur YouTube). C’est un bosseur, le p’tiot. Pourtant le personnage qu’il incarne au fil de ses sons est une sorte de génie de la procrastination.
« J’vis chaque jour comme l’avant dernier. J’me dis que j’ferai tout demain. » (« Forchetta »)
Sur des prods entêtantes, presque mignonnes, Spider ZED fait du contre ego-trip. Dans ses lyrics il n’hésite pas à se moquer ouvertement de lui-même, parfois même avec mélancolie ; mais il n’est jamais déprimant ! Son sens du dosage entre humour noir et innocence fait de lui un super-loser, un « Spider-Machin » qui parle avec franchise de thèmes sérieux et universels comme les relations de couple, la pression parentale ou la peur de ne pas réussir.
« Y’a aucune chance que l’on vive nos rêves
J’parle du futur au conditionnel
J’suis face à l’échec en missionnaire
Avenir bouché, besoin de Physiomer » (« Pas si sûr », Pas si sûr, 2018)
Le jeune rappeur a beau dire, ses efforts payent. Il achèvera en fin d’année une tournée débutée en janvier dernier. On lui souhaite que ça continue et qu’il s’installe toujours plus confortablement dans le rap game, son chat sur ses genoux et une bière à la main.