Vous l’avez peut-être découvert avec ses freestyles 1 minute de rap sur Instagram ou grâce à son récent clip “Comme dans un rêve” sorti le 15 février dernier. Divers, indépendant et visuel. C’est ainsi que Skeezy Sensei décrit son rap. Pour apprendre à mieux le connaître et cerner sa musique, In Da Klub l’a interviewé spécialement pour vous.
Cécile : Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Skeezy Sensei : Je m’appelle Yann, j’ai 22 ans et je vis actuellement dans le 92. J’ai vécu au Burkina Faso jusqu’à mes 18 ans. Je suis franco-burkinabé et je suis né là-bas, ma famille y habite toujours. Après l’obtention de mon Bac, je suis venu à Paris pour poursuivre mes études. J’ai grandi à Ouagadougou mais je connaissais déjà très bien Paris car je venais souvent chez de la famille. J’ai également vécu à Bordeaux et à Cambridge dans le cadre de mes études.
C : Pourquoi “Skeezy Sensei” ?
SS: A la base mon nom d’artiste était “Skyblack”. Mais j’utilisais souvent “Skeezy” comme surnom, dû à la mode américaine comme Weezy pour Lil Wayne, Drizzy pour Drake ou encore Breezy pour Chris Brown. J’ai fini par conserver “Skeezy”, puis j’ai rajouté “Sensei” pour éviter la confusion avec tous les autres “skeezy” sur les plateformes.
C : A quel âge as-tu découvert le rap et avec quels artistes ?
SS : J’ai réellement découvert le rap à 13 ans. La Fouine est venu au Burkina pour un concert en 2010 et j’y suis allé avec mes amis. Pour ne pas être trop décalé le jour du concert, j’ai préalablement écouté Mes repères et Capital du Crime Vol 2. Depuis ce jour j’écoute majoritairement du rap, alors qu’avant ça, j’étais beaucoup plus chanson française, pop, afro, reggae…
C : Quels sont les rappeurs qui t’influencent le plus ?
SS : Ceux qui m’ont réellement fait commencer le rap c’est le trio La Fouine, Booba, Rohff. Par la suite, j’ai aussi pris une grosse claque avec Sexion d’assaut et du côté US j’ai été matrixé par Lil Wayne, Drake et Tyga. Aujourd’hui j’écoute vraiment de tout et ça dépend des périodes. Rien d’hyper original. Sur les deux dernières années, j’ai beaucoup écouté les projets de Josman, Hamza et Dinos. Je m’attache rarement aux artistes, mais plutôt aux albums. Ce qui fait que je n’ai pas vraiment d’a priori sur les rappeurs, uniquement sur les titres en eux-mêmes.
C : D’où viennent tes prods ? Est-ce qu’il t’arrive d’en faire toi-même ?
SS : Vous pouvez aller voir @_lordhk_ sur Instagram. C’est mon frérot avec qui on taff depuis des années, il fait beaucoup de prods pour moi. Sinon je traîne toujours un peu sur YouTube et je travaille avec d’autres beatmakers de façons plus ponctuelles. Il fut un temps où j’ai essayé de faire des prods mais je n’ai pas eu assez de temps pour me mettre vraiment dessus et progresser. J’ai commencé la musique par la guitare puis le piano vers 10–11 ans. Je pourrais peut-être rattraper ça.
C : Fais-tu du rap à plein-temps ?
SS : Non car je suis encore étudiant. Mais j’ai créé Blvckcrow Prod avec Lord HK, il y a une chaîne YouTube.
Avec cette structure, on produit quelques artistes (beats, mixage de sons, DA et clips). Aujourd’hui je bosse beaucoup sur les clips d’autres rappeurs mais également sur des projets plus larges. Je suis d’ailleurs sur un projet de documentaire pour fin 2020 : Revolution Africaine par la Parole Documentary. (On vous en parle à la fin de l’article).
C : Avec quel rappeur aimerais-tu faire un feat ?
SS : A mes débuts j’étais hyper chaud pour des feats, voire créer un groupe… mais vraiment au tout début. J’ai d’ailleurs commencé le rap en binôme avec mon frérot The Brain (@lovelovethebrain sur Instagram).
De manière générale, les autres rappeurs m’ont souvent fait tourner en bourrique. Ça m’a démotivé et j’ai décidé de ne plus faire de featurings saufs exceptions. Je suis dans une optique de développement personnel, pour creuser mon propre univers. Si tu n’apportes pas quelque chose au morceau que je ne sais pas faire, non merci. Après si on me propose un mec comme Hamza ou Ninho je ne vais pas réfléchir longtemps (rires).
C: Tu envisages de sortir un album ?
SS :Techniquement, je n’ai sorti que des mixtapes jusque-là : Corps Beaux, 2 Good 2 Care et Septième Ciel. Le travail d’un album est beaucoup plus complet et plus recherché. J’espère avoir les moyens et le soutien suffisant pour un jour en faire un. Dans tous les cas, si j’en fais un, il faut qu’il soit à 300% comme je l’imagine, ça va être dingue.
C : Quels sont tes rituels pour écrire ?
SS : La grande majorité du temps j’écris tard la nuit (après minuit) ou quand je me réveille. Je ne sais pas pourquoi mais ce sont les moments où mon esprit est le plus productif musicalement.
C : Sur quels thèmes préfères-tu écrire et y a‑t-il des sujets que tu refuses d’aborder ?
SS : Ça dépend vraiment de mon mood. Y’a des semaines je suis en mode trap. D’autres semaines, je suis plus triste, donc j’écris des textes tristes. Certaines semaines j’écoute que du Wizkid et du Burna Boy, donc j’enregistre que des sons afros. Je n’ai pas de préférences dans l’absolu. J’ai déjà écrit des textes sur le décès de certains proches mais je ne les ai jamais enregistrés. Peut-être qu’inconsciemment je me refuse encore à ce sujet.
C: Dans ton titre “Comme dans un rêve” tu dis :
« Je n’ai pas peur de ce que je suis mais de ce que je deviens »
Est-ce que tu as l’impression d’avoir changé depuis que tu rappes ?
SS : Je suis très solitaire et casanier de base. Parfois j’ai l’impression que le rap accentue encore plus ce trait de mon caractère. Parfois quand je prends du recul, je me rends compte que ça fait deux semaines que je ne suis pas sorti de chez moi. J’ai la tête dans ma musique 24/7 et j’oublie de voir les gens. Ça, ça me fait un peu peur. Le travail m’absorbe trop. Instagram ce n’est pas la vraie vie, il faut faire attention et s’entourer de personnes qui te parlent d’autres choses que la musique et des projets.
C : C’est quoi la suite ?
SS : Je vais essayer de sortir une mixtape en fin d’année en collaboration avec le beatmaker Lord HK et développer ma chaîne YouTube. Je trouve qu’il y a un déséquilibre entre mon Instagram et YouTube. J’ai créé cette chaine il y a un mois, je vais essayer de balancer beaucoup de contenus visuels et originaux. Pour le reste, je préfère agir que d’en parler. J’ai plein de projets sur le feu et si Dieu le veut 2020 sera une très belle année.
Révolution Africaine par la Parole est un futur documentaire qui mettra en lumière l’histoire du Burkina Faso à travers le hip hop. Le but est également de rendre hommage à ce genre musical, très souvent critiqué. Le rap et le hip hop sont des instruments culturels, sociaux mais aussi politiques. Ce documentaire permettra d’en savoir plus sur l’histoire du hip hop burkinabé qui reste encore très méconnu de la population du pays mais aussi à l’étranger. Le documentaire sera tourné au Burkina Faso en France ainsi qu’aux États-Unis.
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