Le 12 janvier, Kaki Santana publiait Piège Volume 2. Un projet qui fait suite à sa première mixtape Piège. Retour sur le nouveau projet d’un des techniciens de la Ligue des Ombres.
Le 12 janvier, Kaki Santana partage sa nouvelle mixtape sur les plate-formes de streaming. Un projet de 11 titres comportant deux featurings (DOC OVG et le Black Jack), et réalisé par Mediabox Production. Piège Volume 2 s’inscrit dans la lignée des différentes mixtapes proposées par le 667 : une ambiance pesante et sombre, leanée, et des lyrics à la fois égo-trip et critiques, propres aux membres du Mangemort Squad. La mixtape est illustrée par deux clips, « Makin Cash », et « Deuspi ».
Kaki Santana est remarquable par sa grande technicité et sa maîtrise de différents flows, quelle que soit la prod utilisée. Il est peut être l’un des membres les plus innovants du MMS en terme de flows. Il découpait déjà les instrus sur le volume 1 de Piège, mais c’est ici encore plus flagrant. Le niveau d’écriture a bel et bien augmenté, et ses flows puissants et groovy fonctionnent parfaitement sur des prods trap très sombres et brumeuses.
La consommation de lean et de weed sont au rendez-vous, et influencent directement les choix artistiques et les flows du rappeur, et fit à merveille sur des instrus planantes et obscures. De plus, l’artiste propose ici un disque très OV, (« pourquoi j’suis si OV? », « Cross ») entre grosses phases égo-trip, et critiques du système et des élites en place, ce qui fait d’ailleurs le charme du collectif. Kaki Santana prône alors le succès par son travail, sa débrouillardise, et semble vouloir s’élever à tout prix en gagnant le plus d’argent possible. L’argent, la drogue, et la réussite sont donc au centre du projet, à travers de nombreuses lines très OV et égo-trip.
Cependant, sous couverture d’attitude OBS, l’artiste se livre et véhicule des valeurs propres au 667. Il critique les élites et les systèmes en place, et propose sa vision de la réussite, d’une part par un travail acharné d’écriture, d’autre part en gagnant de l’argent (« fuck Babylone », « Makin cash »). Le rappeur propose un constat très actuel du monde, notamment de la situation du continent africain (par rapport aux autres, pillé et assouvi), et montre (paradoxalement) son attachement à l’argent comme seul modèle de réussite et d’élévation.
C’est d’ailleurs l’une des thématiques qui relient les différents projets du 667 (39–45 de DOC OVG, par exemple). On ressent évidemment cet aspect street dans leur univers. Mais les rappeurs du 667 vont souvent chercher plus loin, en analysant ce qui les entoure, dans des textes riches dans l’écriture, tout comme dans les références.
« Donne-moi le cash, deuspi
Tu ne fais qu’aboyer comme un husky »
Comment écouter du 667 sans entendre des ambiances lourdes et cryptiques ? C’est ce qui fait leur style si particulier. Les thèmes abordés s’y prêtent bien : théories du complot, critiques envers les élites au pouvoir, consommation de drogues…Mais c’est dans cette palette de teintes sombres que se composent de nouvelles sonorités, de nouveaux flows, bref: de nouvelles manières de faire du rap. Les prods utilisées dans le deuxième volume de Piège sont donc sombres, oui, mais pas que. On y retrouve des bangers, « Deuspi » en tête, mais aussi des instrus plus « light », plus aérées, comme celle de l’incroyable « Ouais mon jeune », ou encore sur le « Freestyle OBS ».
On peut également noter une certaine expérimentation dans ce deuxième volume de Piège. Des touches orientales de « Makin Cash » au rythme ternaire de « Cross » en passant par des prod très sombres, comme « 50–50″ ou « Lopito Part.2″, la mixtape se révèle très éclectique. De plus, les deux featurings présents, DOC OVG et le Black OVG apportent tous deux une lecture et une interprétation supplémentaires au projet. « 50–50 » (feat. Le Docteur OV) apparaît comme un morceau super-efficace. Les deux rappeurs utilisent de nombreux flows sur une prod rapide, qu’ils n’hésitent pas à découper de part en part. « C.L.Z. » (feat. Black Jack) est du même acabit. Grosse prod, flows maîtrisés et lyrics trap, appuyés d’ad-libs sombres, le titre est un des plus turn-up de la mixtape. L’on retrouve aussi la fameuse technique du chopped and screwed sur certains tracks, ajoutant encore plus de couleurs et de nuances au projet.
Au final, Piège Volume 2 est un projet très complet, efficace, et vraiment nuancé. Kaki Santana a bel et bien level-up sur cette dernière mixtape. La qualité de son rap et ses structures de rimes prouvent bien le talent du rappeur du 667. Les prods unifient le disque, tout en le diversifiant, et permettent au rappeur d’utiliser de très nombreux types de flows. Ce dernier rappe alors la réussite, l’argent, mais aussi les liens forts entre les membres du collectif, et leurs ambitions à toute épreuve.
EKIP.