Le rappeur underground préféré de ton rappeur préféré. MF DOOM, rappeur et producteur au masque d’acier et aux intros de 4 minutes apparaît comme une figure révolue du hip-hop. Voilà quelques points pour t’en convaincre.
Il suffit de jeter un coup d’œil à son passé pour s’apercevoir que MF DOOM n’a pas choisi de faire du rap de sous-terrain, c’est l’obscurité qui est venu à lui. 1990 marque le début de sa carrière, aux côtés de son frère Subroc, son véritable “partner in crime”, sous le nom de KMD – Kause Much Damage. Un patronyme qu’ils changeront pour Kause a Much Damaged Society dans une optique plus peace. C’est la mort de son frère et collègue de micro en 1993, lors de la sortie du mythique Bl_ck B_st_rds, qui fera basculer MF DOOM dans une vie artistique sombre.
Après l’échec de KMD (l’album n’a pu sortir à cause d’un conflit avec Elektra Records) et le deuil de son frère, DOOM entame une vie d’errance, de drogues dures et de vagabondages. Il en ressort en 2000, délaissant les rimes politiques pour faire naître un héros-monstre cachant son désespoir derrière un masque de métal, ne laissant visible et audible qu’un puissant égo-trip brumeux et industriel.
Sa musique forme une mosaïque hyper-complète et singulière de sonorités d’époques et de textes. Sampleurs assidus des années 70 (The Beatles, Isaac Hayes), fascinés par les comics (c.f ces nombreux clips et aka’s inspirés de Marvel), mêlant des flows instinctifs — presque parlés — et des interludes qui dépassent les limites temporelles. C’est entre 2001 et 2005, qu’il a charbonné et définitivement assis sa réputation dans les ruelles sombres de Long Island.
Operation Doomsday marque réellement l’avènement de DOOM, s’en suivront Take me to your leader (2003) et Madvillainy (2004).
Avec MF DOOM, Dumile s’est littéralement transformé en super-héros sombre, usant de nombreux blazes, cultivant le mystère autour de son personnage, qui a totalement supplanté le rappeur qu’il était jadis. Il a même récemment ramené quelqu’un d’autre derrière son masque en plein concert pour interpréter ses sons.
Ses productions révèlent aussi d’un pluralisme obscur et débordant qui lui est propre. On entend des dialogues sans fin, des bruits de métaux d’usine, l’ambiance de la rue, le temps qui passe. La musique de DOOM vise à faire réagir, à titiller l’oreille de son auditeur par un son unique et chargé de sens et de sons. Un son à peine retravaillé, “crade”, à l’époque des productions léchées au snare près. Il oeuvre avec une garde rapprochée aussi talentueuse que réputée dans le milieu underground: J Dilla et Madlib, notamment sur l’album Born Like This.
Pour les kickeurs, DOOM a couché ses plus belles instrus dans de longues compilations (Special Herbs, volume 1 à 10), de véritables type beats avant l’heure, forts en jazz, funk, électro, avec une pincée de métallurgie et de synthés rétro.
Le CV de MF DOOM contient autant de featurings que de blazes choisis pour l’occasion par le rappeur, en voici une liste presque exhaustive : Zev Love X (avec le groupe K.M.D.), Madvillain (avec Madlib), DANGERDOOM (avec Danger Mouse), DOOMSTARKS (avec Ghostface Killah), JJ DOOM (avec Jneiro Jarel), NehruvianDOOM (avec Bishop Nehru)
Malgré de nouvelles épreuves (dont la mort de son jeune fils), l’homme aux mille blazes est revenu à la charge en 2018 avec notamment une grosse mixtape de Noël avec Cookin Soul, à déguster sur YouTube avec une bûche bien fat, un bourbon et un pull en laine crade.