Il y a un mois, Ben plg sortait Dans nos yeux. Un second projet dans lequel le rappeur lillois raconte avec nostalgie, son enfance, sa vie, son évolution… Coup de projecteur sur cet artiste au flow incisif et aux punchlines pleines d’émotions.
Bercé par Niro, Salif… Ben plg a grandi dans la « France du milieu » élevée dans les années 90, qui fait ses courses chez LIDL et pointe aux Assedic. Même si aujourd’hui, il n’a plus besoin de « comparer le prix des paquets d’pâtes » au supermarché, le rappeur lillois prend néanmoins toujours autant de plaisir à mettre en lumière ce quotidien ordinaire avec tendresse et sincérité dans son deuxième album, Dans nos yeux, sorti le 24 septembre.
Depuis ses débuts dans le rap game, il y a huit ans, le rappeur originaire de Tourcoing (Nord) a toujours eu l’envie de créer des projets. Il montera d’abord sur scène sous un autre pseudonyme, mais c’est avec l’étiquette Ben plg (à lire Ben pour la gloire), adoptée en 2018, que l’artiste fera la première partie de la dernière tournée d’NTM, à Lille et au Luxembourg. « C’était un truc de dingue. À ce moment-là, je n’avais que quelques singles à présenter. J’ai donc décidé de sortir mon premier EP pour avoir une actualité lors de mon passage sur scène », explique-t-il. Pour la Gloire voit alors le jour. Une carte de visite de neuf titres, qui offre un premier pas, très réussi, vers l’univers touchant de Ben plg.
Un an après la sortie de ce projet, le rappeur revient encore plus fort et dévoile Dans nos yeux. Un album qui met en musique les petits instants de la vie, sans fioriture, qui réchauffent le cœur telle une bonne pinte de Maredsous entre potes ou qui, quelquefois, le brisent, comme l’annonce d’une rupture. « Avant d’écrire mes textes en studio, j’emmagasine tout ce que je vois et je me gonfle de pleins de sentiments. Une fois devant le micro, je lâche tout », décrit-il. Pendant 14 titres, on écoute alors ces histoires, simples mais remplies d’émotions, et on se laisse à penser que la misère est si belle.
« Génération divorce, pâtes au beurre éco+, Bambi meurt en silence pendant qu’papa est aux putes » — Mon frérot.
En parallèle de son évolution dans la musique, Ben plg travaille depuis de nombreuses années dans le social : auprès de personnes en situation en handicap ou en prison, où il donne des cours de rap. Cet amour pour l’autre s’illustre parfaitement dans ces textes, mais aussi dans le choix de la pochette du projet. Dans un bar PMU, « on y retrouve une maman qui allaite, un sans-abri, une personne âgée…, décrit-il. J’aime les gens à fond, ils me passionnent. C’est pour ça que l’album s’appelle Dans nos yeux. J’y raconte à la fois ce qu’il y a dans les miens, mais surtout ce qu’il y a dans ceux des autres. »
Dans nos yeux, c’est aussi une forme de journal intime à coeur ouvert où Ben plg n’hésite pas à se confier sur des sujets très personnels comme son enfance pas toujours toute rose, le divorce de ses parents ou son adoption. Des thématiques très peu abordées dans le rap français selon lui : « Quand j’étais au collège, c’était l’époque où tous les parents se séparaient. Jamais, dans le rap, on a parlé de ce que peut causer un divorce à un gosse en construction. Alors moi, je le fais. Pareil, j’ai un petit frère en situation de handicap j’en ai parlé dans Pour la Gloire. Je suis comme ça, je ne te connais pas, je te raconte ma vie.»
« On allonge nos tripes sur l’instru », on fait pas d’son vite fait » — J’hésite.
Pourtant, si Ben plg donne l’impression de se livrer facilement, le processus d’introspection était, au départ, assez compliqué pour l’artiste : « J’avais du mal à ce que ma personnalité transparaisse dans ma musique. J’ai mis huit ans avant de réussir à le faire. Mon but, c’était que Ben plg ressemble le plus possible à qui je suis moi en tant que personne. J’ai remarqué une progression énorme sur la définition de mon personnage et je pense que je me suis trouvé artistiquement avec cet album », assure-t-il.
Les retours de ses auditeurs, de ses proches, des médias… vont dans ce sens et l’encouragent. « Quand t’as des mecs avec des énormes carapaces qui viennent te voir et qui te disent « avec cette phrase-là, mec, tu m’as trop touché ». Tu te rends compte que ta vie parle à pleins de gens en fait. C’est un sentiment incroyable que de voir que ta musique est comprise et qu’il y a des personnes qui t’écoutent », confie-t-il.
Fier de ce projet, qu’il ne pensait jamais sortir dans sa vie, Ben plg se projette déjà dans l’après : « là, on a besoin d’enchaîner et de bosser sur la suite, pourquoi pas sur une tournée quand les conditions le permettront », dévoile-t-il. Avant de repartir pour un enregistrement en studio, il plaisante : « Aujourd’hui, je commence à avoir un peu de lumière donc je suis plus obligé de faire les courses les LIDL, c’est un peu mon ascension sociale à moi. »