Le temps passe vite quand on prend autant de plaisir à vous faire découvrir la scène de rap allemande petit à petit. Cette semaine, c’est Sido que nous posons sous les projecteurs d’In Da Klub. Notre série Deutsche Qualität n’a pas pour seul but de dénicher les petits, mais cette série vous permet aussi de vous donner les noms indispensables à connaître chez nos voisins germanophones!
« Super-Intelligentes DrogenOpfer »
L’abréviation donne donc Sido. « Victime de stupéfiant super-intelligente », si nous le traduisons mot par mot en français. Une autre option serait « Scheisse in dein Ohr » (merde dans tes oreilles), comme notre artiste du jour le décrit dans un morceau à ses débuts musicaux. Aujourd’hui, peu importe, c’est juste Sido. Le Berlinois, de son nom complet Paul Hartmut Würdig, n’a pas besoin d’être présenté en Allemagne. Tout amateur de rap le connaît là-bas, il fait partie des anciens tout simplement.
Partons ensemble en direction de la capitale allemande dans les années 80 où Sido naît, à Berlin-Est plus précisement. C’est une anecdote que Sido a cependant eue du mal à rendre public, pendant longtemps il en faisait un secret et mentait sur son quartier d’origine. Il pensait que ce n’était pas « cool » et ne voulait pas être traité différemment. À l’âge de treize ans, le jeune Allemand débutait le rap après avoir été intéressé par un groupe de musique de son école. Seulement, il ne savait ni chanter ni jouer d’un instrument. Sido rédigeait ses premiers textes en anglais, mais allait très bientôt se focaliser sur le rap dans sa langue natale.
Il y a maintenant plus de vingt ans, Sido fait ses premières prestations dans un bar local. Il est membre de plusieurs collectifs à cette époque : le duo Royal TS qu’il incarne avec son ami d’enfance susnommé B‑Tight et par la suite Die Sekte. Le label Aggro Berlin vient tout juste d’être fondé et prend le duo sous contrat qui se renomme A.i.d.s (Alles ist die Sekte). Au début des années 2000, Sido sort également des morceaux en solo qui seront par la suite la priorité du label. Comme beaucoup de rappeurs, il va ainsi se lancer en solo après des débuts au sein d’un groupe.
Une carrière sur-dimensionnelle
Sido publie son premier album Maske en 2004 qui atteint une troisième place dans les top albums. Nom bien choisi, Sido ne se montrait plus qu’avec un masque de tête-de-mort en chrome. En effet, son morceau qui le fit connaître au grand public est « Mein Block » (mon bloc) où il décrit les conditions sociales semblables à un ghetto qui règnent dans la banlieue de Märkisches Viertel. Sido installe ainsi le Gangsta-Rap en Allemagne et les Allemands l’adorent.
Maske est très rapidement disque d’or en Allemagne tout comme son deuxième opus Ich (moi). Ce dernier a été en or en seulement deux jours. À partir de ce moment-là, c’est une montée en ligne droite. Sido acquiert parallèlement une présence télé importante avec la participation à des multiples émissions. C’est peut-être le dernier coup de pub qu’il lui fallait pour son troisième album : Ich und meine Maske (moi et mon masque).
Succès total ! Ich und meine Maske est son meilleur projet jusqu’ici, si on se fie aux chiffres. Pour la première fois, Sido se hisse au sommet des top albums dans la république fédérale. Les pays voisins germanophones le savourent tout autant, avec une deuxième place en Autriche et en Suisse. Les ventes sont au rendez-vous : Sido et son masque reçoivent deux disques d’or. En Suisse, l’album atteint même le statut platine.
Après un quatrième album Aggro Berlin (en hommage au label homonyme) qui ne peut pas prétendre aux succès précédents, Sido s’oriente vers un changement de style. Même les « papas » du rap doivent s’adapter aux goûts et préférences des auditeurs pour rester compétitifs, rappelez-vous de Fler dans notre épisode 3 qui a vécu une histoire semblable.
« Ich bin der Vater von diesem Rap-Ding
Es fliesst in meinem System » /
« Dieser Hip-Hop ist mein Leben
Falls du fragst, warum ich das mach »
- Sido dans « 2002 »
(Je suis le père de ce truc de rap, ça coule dans mon système / Ce hip-hop c’est ma vie, si tu te demandes pourquoi je le fais)
Une période de quatre ans sans album solo de Sido suit, période pendant laquelle le rappeur se réinvente avant de revenir plus fort que jamais avec l’album 30–11-80, sa date de naissance. Les faits sont là : disques de platine en Allemagne et en Autriche puis en or chez les limitrophes helvétiques. Les albums VI et Das goldene Album (l’album doré) sortis ensuite se vendent également bien. Son dernier et huitième album solo date de fin 2019, Ich und keine Maske (moi et pas de masque).
Un Sido qui évolue, une qualité inchangée
Depuis longtemps, le Berlinois montre sa polyvalence dans le rap en interprétant les styles suivants: Gangsta-Rap, Pop-Rap, Rap-Rock, Trap, Comedy-Rap… Dans les années précédentes, Sido s’est ouvert à un public plus large en développant à partir du Ghetto-Rap, dans lequel il régnait sur l’Allemagne avec Bushido à l’époque.
Pour revenir sur le dernier projet solo de Sido, Ich und keine Maske ne pouvait encore une fois pas éviter une première place en top album en Allemagne, ni en Autriche d’ailleurs. Outre le fait que l’album soit tout simplement un plaisir ultime pour tous les fans de rap, Sido doit avoir sa vraie fanbase dans son dos depuis des années, qui, comme les chiffres le prouvent, sont toujours au rendez-vous.
L’artiste actuellement sous contrat avec Urban/Universal Music a invité pas mal de monde sur son album, ce qui lui apporte vraiment un bon mélange. Les chanteurs Monchi et Nico Santos apparaissent ainsi sur les titres respectifs « Leben vor dem Tod » (vivre avant la mort) et « Fällig » (dû). Les rappeurs Yonii et Beka sont présents sur « Melatonin », puis même l’étoile montante du rap allemand, Apache 207 a eu droit à son feat sur « 2002 ».
Ich und keine Maske occupe toujours la 54e place des top albums, plus de trente-quatre semaines après sa mise en vente. Plus que deux mois, avant qu’il établisse son record personnel. Le nom du projet marque peut-être cet abandon du Sido d’avant, qui avait un style plus sombre, plus « ghetto » qu’aujourd’hui.
Il faut savoir que Sido est tout aussi polyvalent en dehors de la musique. Rappeur, songwriter, producteur premièrement, puis ensuite acteur, entrepreneur et personnage télé… Il joue dans plusieurs films et fait des apparitions dans des séries. Mais, à la télévision, vous aurez plus de chances de le voir dans différentes émissions de la chaîne Prosieben. Surtout, depuis qu’il fait partie du jury de The Voice of Germany.
Sido possède, entre autre, deux salons de tatouage puis un bar. Avec l’entreprise belge On.Earz, il a développé son propre casque audio. Il est co-fondateur de la marque de vodka Kabumm aussi. Plus important, il est à l’origine du label Goldzweig créé en 2015.
Pour finir, la carrière de Sido est juste grandissime, un multi-talent dans tous les domaines. Ce n’est pas une surprise qu’il ait vendu (jusqu’à maintenant) plus de 5,7 millions enregistrements sonores dans ses vingt ans d’activité et gagné une multitude de prix dont un MTV Europe Music Award.
Il est l’heure de se lancer dans le rap allemand, quoi de mieux que de commencer par un des piliers ? Le papa Sido !