Que diriez-vous de sortir un peu dehors et d’observer le ciel ? Parce que l’on va mettre en lumière Sheldon, membre de la 75ème session, qui vient tout juste de sortir son album »Lune noire ».
Commençons par présenter ce collectif. La 75ème session est particulièrement discrète bien qu’étendu dans tous les domaines et possédant une grande diversité de talents. Il porte bien son nom : le « Dojo ». Contrairement à la secte 667, il ne s’agit pas d’un groupe fermé ou complotiste. En revanche, le collectif n’est pas tout jeune puisque cela fait plusieurs années qu’on y voit passer des noms tels que Georgio, Sopico ou encore le producteur Yung Coeur, des artistes qui n’ont plus besoin d’être présentés à ce jour. Vous l’aurez compris, comme beaucoup d’autres par le passé, le Dojo est avant tout un tremplin pour une communauté de jeunes qui se consacrent à leur passion pour le son et où la plupart agissent dans l’ombre. C’est le cas de Sheldon — rappeur, beatmaker et ingé son — qui a longuement participé à l’émancipation du groupe. Comme Fantomas, celui-ci est partout sans qu’on le sache puisque l’on trouve 7 projets durant ces années de persévérance : 6 EP et son premier album déjà sur les plateformes. Sheldon veut être le maître du jeu et avoir le total contrôle de son univers, et c’est pourquoi en plus des textes, il se lance dans son 1er EP instrumental en 2014 qui marque le début de sa carrière de producteur.
Sheldon fait partie de ceux que j’aime appeler la « Génération Pokémon ». Il est vrai que la culture japonaise moderne influence depuis quelques années les loisirs — jeux vidéos, animés, mangas — mais aussi la mentalité des plus jeunes. Depuis peu, on observe dans le rap une déferlante de références par des artistes populaires (Booba, Pnl, Jul, Haristone,..) comme par des moins connus ( Freeze Corleone, D.Ace,..). Comme Youv Dee de ODP, Sheldon baigne dans cet univers un peu spécial et a réussi à combiner ses deux passions que sont l´illustration et la musique. On peut observer à travers ses oeuvres un homme qui porte une certaine obsession pour la Lune, la technologie et le fantaisique. Son freestyle »Quart de Lune » qui s’étend donc sur 4 parties est pour moi la parfaite illustration — ou caricature — de son monde. Les ambiances y sont différentes, mais on y retrouve cette atmosphère originale et pesante qu’il a réussi à créer de toutes pièces. Un espace où les rêves et la réalité se confondent, entre les anges et les démons, entre les robots et la magie, on y trouve une originalité extraordinaire dans la structure et les lyrics, une démarche habile de la part de l’artiste pour son art.
Pour la référence, je citerais Jazzy Bazz dans »Le roseau » qui rejoint l’idée subtile qu’a voulu enseigner Sheldon : » Dans ce monde où la raison recule / J’aimerai éclairer les consciences mais je ne suis qu’un rayon de lune ».
Sheldon fait partie de ces artistes qui posent aussi bien sur du lofi, à l’image de son projet avec Sanka, que sur de la trap, avec ses titres « Nagato » ou « Ripley ». C’est ce signe distinctif qui le fait entrer dans le cercle du rap auxquelles sont facilement associées les sonorités de Népal ou de Sopico. Il apparaît d’ailleurs souvent aux côtés de ces deux artistes, voire de M le Maudit et Inspir, tous membres de son collectif.
Ce rappeur « couteau suisse » ne s´arrête pas là, puisque Sheldon mène en parallèle différents projets : une bande dessinée explicative de son album (à voir sur son Instagram), un jeu vidéo mis en ligne gratuitement et retraçant l’histoire du héros et une exposition ayant récemment eu lieu à Paris.
C’est en bref un artiste complet et determiné avec une imagination débordante qui a su poser sa marque, sa signature et se démarquer de ce que l’on peut entendre aujourd’hui. Sheldon fait partie d’un grand équipage et livre son talent et sa passion au gré à ceux qui l’écoutent et le soutiennent.