Dooz Kawa, c’est un des mecs qui a le plus bourlingué dans le rap français. Et paradoxalement, il semble voué à une place sempiternelle dans le Panthéon des artistes inconnus.
Il faut dire qu’il cherche. Le Strasbourgeois est un grand amateur des influences d’Europe de l’Est, de rap conscient et de textes alambiqués. Et ce genre de petit cocktail, ça n’aide pas à faire des hits. Pourtant, en 2016, on attendait l’explosion après la sortie de l’excellent Bohemian Rap Story, dont le premier son « Me faire la Belle » atteint presque les 3 millions de vues sur YouTube.
Mais qu’importe, 12 K.O reste un artiste de niche, et la sortie l’année suivante de Contes Cruels n’a pas fait grand bruit. Depuis, silence radio. Enfin c’est ce qu’on a voulu nous faire croire. En cherchant un peu, on trouve des collabs en tout genre, et toujours avec la même équipe : Swift Guad, Davodka, Tekilla ou Demi Portion, et encore une trentaine d’autres « petits » blazes tous aussi qualitatifs les uns que les autres.
L’indépendance en action, album multi-interprètes sur lequel apparaît Dooz Kawa.
Mais pour ces artistes comme pour DK, la fanbase est solide et reste à l’affût de la moindre annonce. Cette dernière est arrivée le 10 décembre dernier sur les réseaux sociaux, avec l’annonce de Nomad’s Land pour le 31 janvier 2020. Pour cet album, Dooz Kawa affiche d’entrée la couleur. La pochette est, comme d’habitude, une œuvre d’art : on y voit un cavalier seul au milieu d’un paysage désolé, de dos, façon apocalypse ‑faisant peut-être écho au son « Crépuscule d’Apocalypse » dans Bohemian Rap Story.
Déjà visible sur les différentes plateformes de streaming, la track-list est alléchante : On aura droit à des feats signés Davodka, Swift Guad, Gaël Faye, Dorian Astor ou encore Shantel.
Le featuring avec ce dernier, « Arcueil Cachan », est d’ailleurs déjà disponible, faisant office de trailer. Shantel, DJ et musicien allemand, est connu pour ses inspirations des Balkans. Et c’est donc tout naturellement que les deux lascars se retrouvent à collaborer.
Ce son regroupe tous les ingrédients qui font le 12 K.O : Instru à base de cuivres, hymne à un amour cruel et utopique, et un protagoniste malheureux :
« Mon cœur est un horrible ami,
Comme un brouillon trop raturé,
Je froisse et jette l’origami
De cet organe qui m’aura tué »
Le titre « Arcueil Cachan » sert peut-être à placer sur la carte la muse de cet amour déchu, mais ce dernier semble voué à l’oubli:
« Comme l’horizon des HLM,
Ce coussin qu’accueille le couchant,
D’un clin d’œil te cachant
Où est passé Arcueil Cachan ? »
Le Strasbourgeois est toujours aussi adroit dans sa capacité à mêler à ses instru mélancolico-joyeuses des textes touchants, où il se place en antihéros pathétique et poétique. Si « Arcueil Cachan » a disparu, son talent est toujours là et nous donne rendez-vous le 31 janvier pour un cinquième album qu’on espère aussi explosif qu’un No man’s Land en 14–18.